Compagnon numérique
à l'ouvrage Le troisième souffle :

Enquête sur les adaptations littéraires à la télévision

Sabine Chalvon-Demersay

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Introduction

Dans ce compagnon numérique, nous proposons un recensement des adaptations littéraires diffusées à la télévision française pendant près de soixante-dix ans, entre 1950 et 2018, sur les six chaînes de télévision hertziennes. Nous avons élargi le champ de la notion d’adaptation au-delà du périmètre habituel, en y incluant non seulement les œuvres littéraires mais aussi les pièces de théâtre et œuvres dramatiques réalisées pour la télévision ou retransmises par elle. Nous nous sommes concentrés sur la culture classique. Nous avons pris comme critère de définition de ce que nous avons appelé la culture classique toute œuvre dont l’auteur principal est né avant 1880.

Dans les données et visualisations présentées ici, le terme “adaptation” correspond à cette définition.

Ce travail répond à trois objectifs. 

D’une part, il permet d’expliquer le choix du corpus sur lequel a reposé l’analyse présentée dans Le troisième souffle, en la resituant dans un contexte plus général. D’autre part, il cherche à rendre justice au travail considérable effectué par les réalisateurs de la télévision française pour mettre à la disposition du public les œuvres de la culture classique. Enfin, il vise à apporter une contribution à un inventaire de toutes les fictions produites pour la télévision française depuis 1950.

La restitution de cette enquête prend trois formes. 

  • Un atlas présente les graphiques et les visualisations qui permettent de saisir les principaux résultat,  les tendances et les évolutions.
  • Un excursus méthodologique explique comment nous sommes parvenus à ces chiffres, en explicitant les conventions retenues, les sources analysées, les difficultés rencontrées.
  • Des ressources que nous souhaitons mettre à disposition de toute personne intéressée : un annuaire, qui constitue le principal résultat de ce travail, présente  l’ensemble des œuvres de la culture classique adaptées pour la télévision. Elles sont organisées par auteur original, réalisateur et titre ;  différents tableaux analytiques et fichiers de données donnent accès aux résultats obtenus ; cette partie en ligne est articulée avec un dépôt effectué sur Didómena, l’entrepôt de données de la recherche de l’EHESS, dans lequel sont archivées les 6000 pages de critiques de Télérama qui documentent chacune des œuvres retrouvées et présentées (générique, critiques, etc.)

Atlas

Principaux résultats de l'enquête

1905 œuvres écrites par un auteur original né avant 1880 ont été diffusées à la télévision française entre 1950 et 2018. Cela représente environ une œuvre sur sept.

Distribution du nombre d’adaptations par auteurs anciens originaux

Les adaptations retrouvées ont été écrites par 326 auteurs principaux ; 160 d’entre elles ont mobilisé plusieurs auteurs, ce qui conduit à ajouter 44 personnes. Ce chiffre, relativement modeste, incline à la méditation : l’ensemble des œuvres culturelles représentées à la télévision repose donc sur 370 auteurs qui sont ainsi à l’origine du canon de la culture patrimoniale diffusée. 

Le graphique ci-dessous représente l'ensemble des auteurs nés avant 1880 adaptés à la télévision française. La hauteur de chaque rectangle de couleur est proportionnelle au nombre d'adaptations par auteur. Les deux colonnes correspondent respectivement à la moitié de toutes les adaptations réalisées, donnant à voir la popularité inégale entre les auteurs adaptés.

Il faut survoler chaque rectangle pour obtenir des informations précises pour chaque auteur (notamment dans la colonne de droite).

Auteurs les plus adaptés totalisant la moitié de toutes les adaptations réalisées
Auteurs les moins adaptés totalisant la moitié de toutes les adaptations réalisées
période de l'auteur
  • antiquité
  • moyen-âge
  • seizième siècle
  • dix-septième siècle
  • dix-huitième siècle
  • dix-neuvième siècle
MOLIÈRE (128)Eugène LABICHE (82)Guy de MAUPASSANT (66)Pierre Carlet de Chamblain de MARIVAUX (62)Georges COURTELINE (55)Georges FEYDEAU (55)Honoré de BALZAC (49)Alfred de MUSSET (48)William SHAKESPEARE (48)Anton TCHEKHOV (47)Alexandre DUMAS (34)Victor HUGO (33)Carlo GOLDONI (27)Jules RENARD (25)Luigi PIRANDELLO (25)Paul CLAUDEL (23)Tristan BERNARD (22)Jean RACINE (21)Roger FERDINAND (20)Sidonie-Gabrielle COLETTE (20)Henry JAMES (18)Jules VERNE (17)Prosper MÉRIMÉE (17)

La plupart des auteurs sont des dramaturges. La plupart des œuvres présentées sont des pièces de théâtre. Et parmi ces pièces de théâtre, ce sont les comédies qui l’emportent : Molière est l’auteur le plus présent, suivi de près par Labiche.

Les vingt auteurs les plus adaptés sur toute la période

période de l'auteur
  • seizième siècle
  • dix-septième siècle
  • dix-huitième siècle
  • dix-neuvième siècle
00101020203030404050506060707080809090100100110110120120130130auteurnombre d'adaptationsMOLIÈRE128Eugène LABICHE82Guy de MAUPASSANT66MARIVAUX62Georges COURTELINE55Georges FEYDEAU55Honoré de BALZAC49Alfred de MUSSET48William SHAKESPEARE48Anton TCHEKHOV47Alexandre DUMAS34Victor HUGO33Carlo GOLDONI27Jules RENARD25Luigi PIRANDELLO25Paul CLAUDEL23Tristan BERNARD22Jean RACINE21Roger FERDINAND20COLETTE20

Ces résultats conduisent aussi à réviser l’image de l’âge d’or d’une télévision culturelle, ouverte à tous les horizons. La diffusion des Perses d’Eschyle réalisée par Jean Prat, il y a juste soixante ans, le 31 octobre 1961, a fortement marqué les esprits, mais la présentation d’auteurs antiques est très exceptionnelle. Dans la réalité, l’écrasante majorité des auteurs classiques présentés à la télévision sont nés ou ont œuvré au XIXe siècle : 72% des œuvres patrimoniales sont écrites par un auteur qui est né entre 1780 et 1880.

Les auteurs du dix-neuvième par rapport à l’ensemble des auteurs anciens adaptés

période de l'auteur
  • autres auteurs anciens
  • auteurs du dix-neuvième siècle
répartition absolue
1390
515
0 adaptations50 adaptations100 adaptations150 adaptations200 adaptations250 adaptations300 adaptations350 adaptations400 adaptations450 adaptations500 adaptations550 adaptations195019601970198019902000201021367389138334111204731065181486327

Nombre total d'œuvres télévisuelles diffusées entre 1950 et 2018 adaptées de la culture classique selon la nationalité de l'auteur original

Sur les 326 auteurs principaux, 200 auteurs sont français. Ils ont donné lieu à 1334 adaptations. 126 sont étrangers et en ont généré 570. Les nationalités étrangères les plus représentées étant l’Angleterre (30 auteurs), l’Italie (17), l’Allemagne (15), les Etats Unis (12) et la Russie (10). La plupart des auteurs sont occidentaux. (On compte, par exemple, seulement un auteur chinois).

Réseau des auteurs des œuvres originales et des réalisateurs de leurs adaptations à la télévision

Ces œuvres, dans leur ensemble, ont mobilisé 421 réalisateurs différents. 200 réalisateurs ont adapté au moins deux œuvres.  Ce qui signifie qu’il n’y a pas eu de spécialisation des réalisateurs, jusqu’aux années récentes. Seulement 90 œuvres ont été réalisées par des femmes. (Il faut dire que dans l’ensemble de la période de la RTF et de l’ORTF, tous genres confondus, on compte seulement 35 réalisatrices.)

Les captations théâtrales demandaient à l’origine une forte implication des réalisateurs de télévision, mais progressivement leur rôle s’amenuise. Dans les années récentes, leur nom n’est même plus mentionné dans les journaux de programme : seul figure celui du metteur en scène de la pièce retransmise.

Pour connaître les noms des auteurs et des réalisateurs d'adaptations, survoler les disques vert et orange.

type de personne
  • auteur
  • réalisateur

Évolution des genres d'adaptation dans l'histoire de la télévision française

Pour classer les œuvres de la culture classique par genre, nous  avons repris les catégories utilisées dans les Fictions françaises à la télévision (Doniak, 1998 ; Doniak et Schmidt, 1998) et distingué les œuvres unitaires (qui peuvent comporter de un à trois épisodes) et les unitaires en collection, les feuilletons à partir de quatre épisodes, les captations ou retransmissions de pièces de théâtre. Si on regarde la répartition  par genre de ces œuvres patrimoniales, il apparaît que 72% d’entre elles sont des unitaires ou des unitaires pris dans des collections ; 22% sont des captations ; 7% sont des feuilletons. 

En nombre d'adaptations par décennie

genre d'adaptation
  • captation
  • dramatiques et unitaires
  • feuilleton
  • unitaire en collection
répartition absolue
1049
410
321
0 adaptations50 adaptations100 adaptations150 adaptations200 adaptations250 adaptations300 adaptations350 adaptations400 adaptations450 adaptations500 adaptations550 adaptations195019601970198019902000201022257313828628111187975084966136546137564524522116

Précisons que les collections peuvent être organisées autour de la vision d'un réalisateur : Pierre Cardinal, par exemple, propose dans les années 60, dans L'esprit et la lettre, onze adaptations romanesques (dont seulement 6 rentrent dans le périmètre de notre enquête). Elles peuvent correspondre aussi au choix d'un producteur : Claude Santelli adapte pour un public familial des grands textes de la littérature universelle dans Le Théâtre de la jeunesse. Elles peuvent aussi rassembler des œuvres d'un même auteur. Ainsi, en 1964, Comédies et proverbes, autour de Carmontelle; Charles Perrault en 1966 (Si Perrault m'était conté) ; Maupassant en 1963 (Treize contes), en 1980 (L'Ami Maupassant), en 2008 et 2011 (Chez Maupassant ) ; Joseph Conrad (Nouvelles et romans de Joseph Conrad, 1973) ; Jack London (L'appel de l'or, 1977). ; Colette (Les héroïnes de Colette, 1990, 1991), James Oliver Curwood (Aventures dans le Grand Nord, 1994, 1995). Elles peuvent être aussi organisées autour d'un genre littéraire, le fantastique avec Les classiques de l'étrange, en 1974 ; Les histoires étranges en 1980 ; la comédie sentimentale (avec les Amours de la belle époque, les Amours des années folles, ou les Amours romantiques), les œuvres érotiques avec les Séries roses. La plupart sont de grandes collections de théâtre (Au Théâtre ce soir, Cent ans d'humour, La Comédie Française, Emmenez-moi au Théâtre, Le petit théâtre d'Antenne 2, Vive La Comédie, etc.).

Quant aux feuilletons, ils peuvent être de taille et d’ambition très différentes : petits modules de moins d’un quart d’heure diffusés le soir avant le journal ou au milieu de l’après-midi. Ou, au contraire, vastes sagas solennelles se déployant sur plusieurs épisodes.

En pourcentage d'adaptations par décennie

0%10%20%30%40%50%60%70%80%90%100%19501960197019801990200020107.9%91.8%5.9%72.5%16.3%5.3%24.9%42%21.8%11.2%30.3%34.7%22%13%34.4%38.9%23.6%43.4%34.9%18.6%57.8%23.3%17.8%

Par année (zoom sur la disparition des feuilletons)

Genre d'adaptation
  • dramatiques et unitaires
  • feuilleton
0 adaptations5 adaptations10 adaptations15 adaptations20 adaptations25 adaptations30 adaptations35 adaptations40 adaptations45 adaptations50 adaptations55 adaptations60 adaptations65 adaptations70 adaptations19501960197019801990200020102020

Le repli de la culture classique

Si on regarde l’ensemble de la période, on constate un repli de la culture classique. Le nombre d’adaptations littéraires et de retransmissions théâtrales diminue.

Simultanément, le nombre d’auteurs se rétrécit : entre 1950 et 1974, on a 241 auteurs différents ; entre 1975 et 1999 :  191 ; entre 2000 et 2019, il n’y a plus que 83 auteurs. Cette réduction de la diversité s’accompagne d’une re-hiérarchisation : des auteurs qui étaient considérés comme des auteurs populaires deviennent des auteurs canoniques. Un indice : leurs œuvres qui étaient découpées en petits feuilletons donnent lieu désormais à des fictions amples.  Alexandre Dumas en est un bon exemple. Parallèlement, les auteurs secondaires sont oubliés : Auguste Maquet, qu’Albert Thibaudet plaçait quasiment à égalité avec Alexandre Dumas dans l’écriture des Trois Mousquetaires, disparaît des génériques. Claude Barma le mentionne dans l’adaptation qu’il réalise le 25 décembre 1959, (et dans laquelle Jean-Paul Belmondo joue d’Artagnan), mais il ne le signale plus dans celle de 1972. De même, Eugène Labiche qui a écrit 176 pièces, mais seulement sept ou huit tout seul, apparaît de plus en plus souvent comme auteur unique.  

En pourcentage d'œuvres par décennie

type d'œuvre
  • œuvres constituant une adaptation
  • œuvres ne constituant pas une adaptation
0%10%20%30%40%50%60%70%80%90%100%195019601970198019902000201036.8%63.2%34.5%65.5%16.4%83.6%8.1%91.9%3.6%96.4%3%97%2.4%97.6%

En nombre d'œuvres par décennie

0 œuvres200 œuvres400 œuvres600 œuvres800 œuvres1000 œuvres1200 œuvres1400 œuvres1600 œuvres1800 œuvres2000 œuvres2200 œuvres2400 œuvres2600 œuvres2800 œuvres19501960197019801990200020102584434969413341706193219210327817323621543

En nombre d'œuvres par année

type d'œuvre
  • œuvres constituant une adaptation
  • œuvres ne constituant pas une adaptation
0 œuvres50 œuvres100 œuvres150 œuvres200 œuvres250 œuvres300 œuvres350 œuvres19501960197019801990200020102020

La donnée la plus sensible est le calcul du nombre d'œuvres totales diffusées à la télévision française. Avec les conventions que nous avons adoptées et que nous détaillons ci-dessous, nous avons compté une à une, 13 463 œuvres (hors lyrique). Si nous ajoutons les œuvres lyriques, nous arrivons à un total de 14 307.

On assiste simultanément à un grand déplacement des œuvres classiques réalisées pour la télévision vers des œuvres adaptées sur d’autres scènes et simplement retransmises par la télévision. La proportion des captations augmente continûment. L’évolution est encore plus nette pour les œuvres lyriques, qui sont de plus en plus présentes. 184 captations et créations lyriques entre 1950 et 1974 ; 285 entre 1975 et 2000 ; 375 entre 2000 et 2018. Comme si la musique recouvrait la parole.

Évolution des créations et captations lyriques dans l'histoire de la télévision française

Par année

Type d'œuvre
  • captations lyriques
  • créations lyriques
0 œuvres5 œuvres10 œuvres15 œuvres20 œuvres25 œuvres30 œuvres35 œuvres40 œuvres19501960197019801990200020102020

En pourcentage d'œuvres par décennie

0%10%20%30%40%50%60%70%80%90%100%195019601970198019902000201093%7%73.7%26.3%11%89%9.9%90.1%7.7%92.3%100%100%

Zoom sur le XIXe siècle

Focalisons-nous maintenant sur les auteurs nés entre 1780 et 1880. Nous avons vu qu’ils fournissent près des trois quarts des œuvres adaptées.

Les dix auteurs du dix-neuvième siècle les plus adaptés

type d'auteur
  • romancier
  • dramaturge
00101020203030404050506060707080809090auteurnombre d'adaptationsEugène LABICHE82Guy de MAUPASSANT66Georges COURTELINE55Georges FEYDEAU55Honoré de BALZAC49Alfred de MUSSET48Anton TCHEKHOV47Alexandre DUMAS34Victor HUGO33Jules RENARD25

Si nous ne tenons pas compte des œuvres théâtrales, mais seulement des romans adaptés, nous retrouvons Balzac, Alexandre Dumas et Victor Hugo parmi les auteurs les plus présents à l’écran. Cette importance justifie le choix fait pour Le troisième souffle de se concentrer sur des œuvres de ces auteurs.

Évolution des formats de durée des épisodes de feuilletons pour les adaptations d'auteurs du XIXe siècle

Une centaine d’œuvres du dix-neuvième ont été adaptées en feuilletons. Les formats sont significatifs de l’évolution du prestige accordé à ces œuvres. Dans les années 60, ce sont des formats court d’une quinzaine de minutes. Puis les œuvres s’allongent et deviennent plus solennelles et plus légitimes.

En nombre d'adaptations

durée des épisodes
  • 13min
  • 26min
  • 52min
  • 90min
  • autre durée
répartition absolue
33
31
21
12
0 feuilletons10 feuilletons20 feuilletons30 feuilletons40 feuilletons50 feuilletons60 feuilletons70 feuilletons80 feuilletons1950196019701980199010226754192104104162

Par décennie (en pourcentage)

0%10%20%30%40%50%60%70%80%90%100%19501960197019801990100%37%7.4%7.4%22.2%25.9%12.5%10%47.5%5%25%11.4%28.6%11.4%45.7%33.3%66.7%

Les adaptations de Dumas, Balzac et Hugo

Les adaptations de Honoré de Balzac

Légende (adaptations)
  • captation
  • dramatiques et unitaires
  • feuilleton
  • unitaire en collection
Œuvres originales1800180018101810182018201830183018401840185018501860186018701870188018801890189019001900Adaptations à la télévision1950195019601960197019701980198019901990200020002010201020202020LES CHOUANSLE COLONEL CHABERTLA MAISON DU CHAT QUI PELOTEADIEULA PEAU DE CHAGRINLE REQUISITIONNAIRELA GRANDE BRETECHELA FEMME ABANDONNEELE CURE DE TOURSLE FRERE D'ARMEEUGENIE GRANDETLE PÈRE GORIOTMELMOTH RECONCILIEL'INTERDICTIONLE LYS DANS LA VALLEEHISTOIRE DE LA GRANDEUR ET DE LA DECADENCE DE CESAR BIROTTEAUILLUSIONS PERDUESUNE FILLE D'EVESPLENDEUR ET MISERES DES COURTISANESLA DUCHESSE DE LANGEAISUNE PRINCESSE PARISIENNEBEATRIXPIERRETTESCÈNES DE LA VIE PRïVÉE ET PUBLIQUE DES ANIMAUXURSULE MIROUËTMEMOIRES DE DEUX JEUNES MARIEESUNE TENEBREUSE AFFAIRELE CURE DE VILLAGEALBERT SAVARUSLA RABOUILLEUSELA COUSINE BETTELE COUSIN PONSLE FAISEUR

Les adaptations d'Alexandre Dumas

Légende (adaptations)
  • captation
  • dramatiques et unitaires
  • feuilleton
  • unitaire en collection
Œuvres originales1800180018101810182018201830183018401840185018501860186018701870188018801890189019001900Adaptations à la télévision1950195019601960197019701980198019901990200020002010201020202020HENRI III ET SA COURANTONYLA TOUR DE NESLESKEAN, Désordre et génieLES CRIMES CÉLÈBRES (VANINKA)URBAIN GRANDIERLE CHEVALIER D'HARMENTHALLES TROIS MOUSQUETAIRESLE COMTE DE MONTE-CRISTOUNE FILLE DU REGENTLA REINE MARGOTLA GUERRE DES FEMMESLA DAME DE MONSOREAUMÉMOIRES D'UN MÉDECIN (JOSEPH BALSAMO)LE CHEVALIER DE MAISON-ROUGEMÉMOIRES D'UN MÉDECIN (LA COMTESSE DE CHARNY)SALVATOR OU SALVATOR LE COMMISSIONNAIRE (LES MOHICANS DE PARIS)LES MOHICANS DE PARISLES GRANDS HOMMES EN ROBE DE CHAMBRE (OU LOUIS XIII ET RICHELIEU)LES COMPAGNONS DE JEHUUN MARIAGE SOUS LOUIS XVLA SAN FELICE

Les adaptations de Victor Hugo

Légende (adaptations)
  • captation
  • dramatiques et unitaires
  • feuilleton
  • unitaire en collection
Œuvres originales1800180018101810182018201830183018401840185018501860186018701870188018801890189019001900Adaptations à la télévision1950195019601960197019701980198019901990200020002010201020202020HERNANIMARION DELORMELE DERNIER JOUR D'UN CONDAMNÉLUCRECE BORGIAMARIE TUDORCLAUDE GUEUXANGELO, TYRAN DE PADOUERUY BLASLES BURGRAVESLES MISÉRABLESLES TRAVAILLEURS DE LA MERMILLE FRANCS DE RECOMPENSETORQUEMADAL'HOMME QUI RITQUATRE-VINGT TREIZEMANGERONT-ILS ?

Méthode

Périmètre de l’enquête

L’enquête a porté sur des œuvres françaises ou coproductions majoritaires, à destination des adultes, en première diffusion, sur les six chaînes de télévision hertziennes.  Ce choix a des conséquences. Il exclut certes les fictions étrangères qui ont toujours tenu une place très importante dans la programmation– les feuilletons américains sont présents à l’antenne dès les débuts de la télévision française - mais il exclut aussi les coproductions dans lesquelles la participation française est minoritaire. Ce qui signifie que, lorsque des opérations ont regroupé pour des collections prestigieuses plusieurs télévisions européennes ou francophones, réalisant chacune une œuvre tour à tour, nous ne retenons que celle qui est réalisée en France. Nous avons également exclu les œuvres d’animation, les sketchs, les ballets et les spectacles de marionnettes. Nous n’avons retenu que les œuvres intégrales et non pas les extraits placés au cœur d’une émission. Une place à part est réservée aux œuvres lyriques. 

La question qui nous préoccupait ici étant le repérage des œuvres de culture classique, il aurait été absurde de reproduire la distinction existant au CSA ou au CNC entre le spectacle vivant et les œuvres audiovisuelles. Nous avions besoin de saisir les œuvres théâtrales sous toutes leurs formes : des œuvres réalisées dans des studios de télévision avec des comédiens recrutés pour l’occasion ; une troupe quittant son théâtre pour venir jouer pour la télévision (comme ce fut le cas dans les débuts des accords avec La Comédie française) ; un spectacle se déroulant dans un théâtre avec un public venu spécialement pour l’enregistrement de l’émission (comme pour Au Théâtre ce soir, au théâtre Marigny). Mais aussi des pièces jouées dans des théâtres fermés au public pour le soir d’une représentation spéciale pour la télévision, ou encore tout simplement des retransmissions télévisées d’un spectacle représenté en public. C’est pourquoi nous avons ajouté les captations.

L’idée étant de se focaliser sur la production originale, nous avons exclu les rediffusions, même si celles-ci constituent évidemment un indice de l’intérêt suscité par l’œuvre : nous nous sommes focalisés sur les premières diffusions. 

Des questions plus subtiles se sont posées sur la définition même d’une œuvre littéraire, avec des décisions à prendre sur des cas limites. Les œuvres construites sur des souvenirs littéraires peuvent-elles être considérées comme des adaptations, si elles sont fondées sur des récits autobiographiques (comme les évasions de Casanova), ou sur des correspondances, comme les aventures de Germaine (de Staël) et Benjamin (Constant) ? Dans ces cas, j’ai tranché de façon négative. J’ai toutefois inclus Vidocq, et ses souvenirs, pour des raisons que j’ai expliquées dans le livre, du fait de la postérité littéraire du personnage, décisive pour la compréhension de la forme prise au XIXe par les romans de la reconnaissance. Nous avons aussi rencontré des problèmes d’attribution. Les grands textes mythologiques ou religieux ont été attribués au repreneur le plus récent. Le problème s’est posé, par exemple, pour les trois Antigone, de Cocteau, de Brecht et d’Anouilh que j’ai finalement laissées à ces trois auteurs,  en décidant de ne pas y voir une adaptation de la pièce de Sophocle. (Cela revenait à les exclure de la base, puisqu’ils étaient tous trois nés après 1880, respectivement en 1889, 1898 et 1910.) Même type de raisonnement pour le Chemin de la Croix, ainsi attribué à Claudel. Hésitations enfin générées par les titres eux-mêmes. Nous avons toujours retenu le titre de l’œuvre télévisuelle et non celui de l’œuvre originale. Ce qui conduit à avoir des titres différents pour une même œuvre. (On l’a vu, par exemple, pour Les trois mousquetaires qui peuvent au gré des reprises s’appeler Les quatre mousquetaires, D’Artagnan ou Milady.) Le cas devient toutefois plus épineux lorsque l’inverse se produit. Des œuvres télévisuelles ont le titre d’une œuvre littéraire mais n’empruntent que très peu à l’histoire originelle : il y a ainsi plusieurs Roméo et Juliette, qui servent à raconter des amours adolescentes cruellement empêchées. Le lien a paru trop distendu pour que l’œuvre soit considérée comme une adaptation de Shakespeare.

Sources

Pour établir la liste des œuvres et des auteurs, des sources différentes ont été utilisées.

Pour la première période, de 1950 à 1996, je me suis fondée sur le travail publié par Jean-Marc Doniak (1998) en deux volumes aux Éditions Dixit, Les Fictions Françaises à la télévision, le premier couvrant la période de 1950 à 1990, le second, la période de 1991 à 1997, en collaboration avec Nicolas Schmidt.   Pour la période suivante,  de 1997 à 2020, j’ai utilisé principalement deux ressources. D’une part, le travail de Jean-Marc Doniak qui a continué après la publication de son ouvrage son œuvre d’inventaire de la production de fiction télévisuelle et qui l’a, avec une grande générosité, partagé avec moi. Ce travail sera prochainement déposé à la BNF où il pourra être mis à la disposition des personnes intéressées. L’ouvrage publié en 1998 est ainsi complété par un ensemble d’errata et d’addenda qui corrigent les erreurs qui grevaient l’édition originale qui avait été mal éditée. Les listes qu’il m’a transmises comprennent le genre (unitaire, feuilleton, collection, captations, œuvres lyriques), la date de première diffusion, la chaîne de diffusion, la société de production, et le générique. Une mention indique si la diffusion a eu lieu la nuit ou au petit matin. Ces critères de description présentent l’immense intérêt d’être stables sur toute la période, depuis 1950.

D’autre part, j’ai demandé au CNC la liste des œuvres ayant reçu une autorisation définitive de production entre 1995 et 2020. Une convention  a été signée entre l’EHESS et le CNC qui détermine le cadre dans lequel l’utilisation de ces résultats est autorisée. La liste des œuvres soutenues par le COSIP, qui existe depuis l’extension aux œuvres audiovisuelles du mécanisme de l’avance sur recettes en 1986,  a l’avantage de reposer sur des bordereaux remplis  par les producteurs eux-mêmes, en vue d’obtenir après la diffusion de l’œuvre validée par la chaîne, le complément de son financement. Vu l’importance des enjeux, elle est donc renseignée avec un très grand soin par les intéressés eux-mêmes et sert de fondement à la publication des statistiques et indicateurs par lesquels le CNC informe sur les évolutions de la production audiovisuelle française. La liste mise à ma disposition comprend : l’année, le titre de l’œuvre, la durée du programme, le nombre d’épisodes, la durée de l’épisode, le nom du producteur et celui du diffuseur. J’ai ensuite recoupé les informations contenues dans ces deux sources principales pour dégager celles qui correspondaient à la définition que j’avais retenue des auteurs classiques (c’est-à-dire, rappelons-le, les auteurs nés avant 1880). 

Le travail sur les données a consisté, après avoir établi un modèle clair et robuste de base de données, à importer les données issues des tableaux excel, puis ensuite à piloter une série d’opérations complémentaires d’enrichissement (rajouter de nouvelles informations - comme par exemple le pays de naissance des personnes), de complétion (rajouter des informations manquantes) ou de repentir (corriger des informations qui s’avèrent erronées ou qui n’ont pas pu être importées correctement en raison de problèmes insolubles dans l’organisation des fichiers source) sur la base. L’enjeu principal de ce travail est de maintenir un traçabilité de la source des données entrées dans la base et de ses évolutions successives - de manière à pouvoir interpréter les données individuelles et agrégées en connaissance de l’historique de leur constitution.

Nous avons tout d’abord pris l’index de l’ouvrage, (Doniak 1998), nous l’avons corrigé en fonction de ses recommandations, puis nous avons rentré les dates de naissance et de décès des auteurs nés avant 1914. En procédant de la sorte, je reprenais le principe développé par Albert Thibaudet dans son Histoire de la littérature française, c’est-à-dire  une approche qui regroupe les auteurs des œuvres originales en fonction de leur année de naissance, pour esquisser une approche par génération. Finalement, j’ai décidé de prendre plutôt le seuil de 1880. Cette date permettait d’être sûr que les auteurs concernés n’avaient pas écrit pour la télévision, puisque les plus âgés – ceux qui étaient nés en 1880 – avaient déjà 70 ans au moment de la naissance de la RTF. Une telle décision avait l’avantage de purger la liste obtenue de tout jugement de valeur sur la qualité des auteurs. Munie de cette liste, j’ai ensuite interrogé la base de l’Inathèque pour chacun des auteurs identifiés, puis pour chacun des réalisateurs impliqués. Nous avons alors comparé les listes. Les discordances nombreuses entre ces deux premières sources m’ont conduite à chercher à trancher à partir d’une troisième source : les journaux de programmes.  Claude-Marie Trémois, ancienne journaliste de Télérama, m’a fait don de sa collection complète de Télérama, (3486 numéros, 60 caisses, 450 kilos). Nous l’avons transportée dans notre laboratoire, le CEMS et nous avons commencé les vérifications. Pour les cas non élucidés, une quatrième source a été utilisée, le supplément de programme de la Vie du Rail. Et enfin, de façon plus anecdotique, une recherche ponctuelle, mais souvent infructueuse, a été opérée auprès des journaux des chefs de chaîne. Ce travail ayant duré longtemps, de nombreuses informations ont été rendues disponibles qui ne l’étaient pas au début de la période : le Portail de la télévision française de Wikipedia est monté en puissance, IMDB a rentré des informations sur la télévision, l’Ina a mis en ligne en accès direct pour le public le nom des œuvres et les dates de diffusion sur InaMEDIAPRO, son service réservé en principe aux professionnels. Le résultat de notre enquête a été une validation du travail effectué par Jean Marc Doniak, dans la mesure où sa liste, en fonction des critères qu’il avait définis, s’est avérée extrêmement complète (une vingtaine d’œuvres n’ont pas été retrouvées). Ajoutons que Philippe Lavat et Bernard Papin (Télévision, 2012) ont effectué un travail sur le même thème, publié sous le titre « Les stratégies de la distinction télévisuelle au fil du temps : 60 ans d’adaptations littéraires à la télévision ».  sur un périmètre un peu différent du nôtre, ce qui explique en partie les différences de résultats. (Ils n’utilisent pas le critère de la date de naissance de l’auteur, leur enquête porte aussi sur les écrivains du XXème siècle et ils incluent les œuvres d’animation.)

Chacune des sources utilisées comportait ses limites. Les journaux de programme reposent sur des informations qui sont données par les chaînes souvent deux à trois semaines avant la diffusion. Les œuvres présentées peuvent donc être soumises à des déprogrammations, en raison de grèves et de mouvements sociaux, ou encore du fait du décès d’une personnalité qui entraîne un bouleversement de la programmation. Les données du CNC ne sont disponibles qu’à partir de 1986. À l’inverse, La Vie du Rail cesse au début du XXIe siècle de publier les programmes de télévision.

Quant à la recherche à partir des bases de l’Inathèque, elle suppose une grande vigilance. L’interrogation à partir du nom de l’auteur de l’œuvre originale apportait chaque fois une surabondance de références. Nous avons filtré ces listes en éliminant les doublons résultant de la pluralité des modes d’indexation. Il fallait d’abord retirer des documentaires sur les auteurs, leurs vies, leurs engagements, leurs œuvres qui se trouvaient mêlés aux listes concernant les œuvres elles-mêmes. Il fallait aussi éliminer les extraits. En effet, la télévision relayait fréquemment, dans les actualités télévisées ou dans des programmes régionaux, la création de spectacles présentés sur des scènes locales, dont on diffusait seulement quelques passages et qui n’entraient pas dans le champ de notre inventaire. Nous avons retiré des listes toutes les œuvres de moins de trois minutes. Les œuvres comportant plusieurs auteurs risquaient, si l’on n’en était pas averti, d’être comptées plusieurs fois, puisqu’elles apparaissaient pour chacun des auteurs concernés. De même, certaines œuvres ont été reformatées, fractionnées en épisodes plus petits, ou au contraire, réunies dans des œuvres plus longues : elles ne devaient pas être comptées deux fois. Dans les bases de l’INA, une œuvre apparaît en première diffusion lorsqu’elle est diffusée pour la première fois sur une chaîne précise, même si elle a déjà été diffusée sur une autre. Lorsque la date est incertaine, l’œuvre est indiquée comme ayant été diffusée le 1er janvier de l’année-même. Il fallait aussi retirer les homonymes ; plus le nom était banal, plus les cas ambigus étaient nombreux. Sans parler des erreurs classiques portant sur la retranscription des patronymes, les accents, les trémas, les particules, les noms doubles. On peut y ajouter la transcription de l’alphabet cyrillique (Dostoiëvski se trouvant parfois orthographié avec un y). Toutes erreurs qui débouchent sur des erreurs de quantification. Mais la principale source d’erreurs est le découpage en épisodes, caractéristique de la diffusion télévisuelle. C’est la source d’une confusion fréquente, l’objet télévisuel étant en principe archivé à partir du titre de l’œuvre, mais se trouvant parfois identifié par le titre de l’épisode, ou parfois même le titre de la collection. Seul un travail minutieux, fondé sur la cohérence des dates et la logique des formats, permettait de réattribuer les épisodes aux ensembles  dont ils étaient issus. 

Conventions

Les décisions les plus stratégiques sont liées aux conventions adoptées pour définir les unités pertinentes et leurs évolutions dans le temps, car elles influent dramatiquement sur les comptages effectués et les interprétations qui peuvent être faites d’un point de vue quantitatif. Si l’on considère, par exemple, que chaque épisode de feuilletons est une œuvre à part entière, on quintuple le nombre d’objet recensé.

Pour opérer notre décompte, nous avons repris les principes adoptés par Jean Marc Doniak. Nous  distinguons donc les unitaires ( qui peuvent comporter jusqu’à trois épisodes), les feuilletons (à partir de quatre), les unitaires en collection et les captations. Au début de la télévision, l’opposition entre unitaires, séries, feuilletons et collections est assez simple. Les œuvres unitaires sont nombreuses et valorisées. Les feuilletons s’en distinguent parce qu’ils comportent plusieurs épisodes et qu’ils ont une unité narrative. Entre les deux, les séries ou les collections regroupent des œuvres uniques qui se trouvent liées entre elles par un élément récurrent : que ce soit un héros, un même auteur ou une même thématique, etc. Le terme feuilleton est plutôt dévalué, il porte encore les stigmates de la campagne de dénigrement de la « littérature industrielle » qui a eu lieu au siècle précédent. Les collections sont plus prestigieuses. Mais elles peuvent aussi être plus lâches : leur définition peut aller d’un ensemble fermement contrôlé de fictions, pilotés par un même principe organisateur, à un simple regroupement chronologique. Parfois, une hiérarchie à plusieurs niveaux s’installe, qui crée des catégories intermédiaires. Degré de complication supplémentaire, des feuilletons peuvent aussi appartenir à des collections.

La grande affaire consiste à établir une continuité historique. En effet, dans l’ensemble des programmes, des formes nouvelles apparaissent qui déstabilisent les catégories. Progressivement, la différence entre séries et feuilletons s’estompe : les séries deviennent « feuilletonnantes », c’est-à-dire qu’on commence à suivre les évolutions des personnages. Ensuite, les feuilletons montent en gamme et en puissance.  A la fin des années 80, on commence à chercher à produire des soaps, qui s’étendent sur plusieurs années, genre qui n’existait pas vraiment en France. En cas de bonheur, diffusé en 1989, avec 160 épisodes est l’un des premiers. En 2004, le feuilleton Plus Belle la vie est mis à l’antenne. Il atteint 4363 épisodes en février 2021 et s’étale sur dix-huit saisons. Simultanément, apparaissent des œuvres de formats courts, voire ultra-courts de deux à six minutes. Il devient évidemment malaisé d’établir des équivalences entre des produits de nature, de taille, de dimension et d’ambition si différentes. 

Chaque institution, ayant ses propres enjeux, a sa propre manière de compter. Pour le CNC, qui finance les programmes, le critère pertinent est la durée. Les œuvres déclarées par les producteurs sont ramenées à des formats standards : 90 minutes, 52 minutes, 26 minutes ou formats courts. Le total étant additionné pour donner une mesure de la production globale de fiction dont se saisissent ensuite les professionnels dans leurs débats et leurs revendications. Le volume global de fiction varie d’ailleurs énormément sur la période concernée : 347 heures en 1986, 325 en 1987, au moment de la privatisation de TF1 ; 1057 heures en 1991, le changement de réglementation ayant entraîné une explosion de la fiction légère, puis repli autour de 700 à 800 heures entre 1998 et 2015, avant d’augmenter de nouveau pour atteindre environ 1000 heures en 2018. Le CSA a une autre définition des œuvres, liée à sa mission de respect de la réglementation concernant les quotas de production et de diffusion d’œuvres originales d’expression française et d’œuvres européennes.

La méthode de définition des unités pertinentes que nous avons retenue a pour caractéristique de définir les œuvres comme des formes d’habitacles des personnages. On peut en effet considérer qu’une œuvre est le lieu où cohabitent, pour une durée qui varie en fonction du format -unitaires, séries, feuilletons, collections- un certain nombre de personnages.

Suites

Après avoir effectué un premier dépouillement avec comme seul objectif de permettre de certifier l’une ou l’autre des deux premières sources, nous nous sommes aperçu que la présentation des œuvres, les génériques complets et les articles critiques qui les accompagnent étaient tellement intéressants qu’ils constituaient une  mine d’informations sur la production culturelle française qui valait la peine d’être mise en valeur. Nous avons donc, avec l’aide de nombreux étudiants, organisé deux journées de travail pendant lesquelles nous avons scanné et redressé 6000 pages d’articles déposés dans l’entrepôt de recherche de l’EHESS, Didómena, où ils pourront être consultés, dans le respect de la législation en vigueur. Une fiche a été établie pour chaque œuvre, illustrée par l’article correspondant. 

Grâce à Madelen, la nouvelle plateforme SVOD de l’INA, lancée en mars 2020, un certain nombre de ces œuvres sont désormais accessibles en ligne dans une offre de streaming illimité, disponible sur tous les écrans pour un prix d’abonnement modique : elles pourront donc, enfin, être revues. 

Conclusion 

Ainsi s’achève une enquête qui a porté sur soixante-dix ans d’adaptations littéraires à la télévision. Au moment où la télévision commence, entre 1950 et 1955, près de la moitié des œuvres diffusées relèvent de la culture classique.  Dans les cinq dernières années, elles se comptent sur les doigts des deux mains. À l’époque où la télévision diffusait ces œuvres, la question du public ne se posait pas dans les mêmes termes qu’aujourd’hui. Un des enjeux de ce travail a été l’historicisation d’un objet culturel non remarqué, et aujourd’hui largement oublié.

La présentation qui a été faite dans Le troisième souffle porte sur quelques œuvres qui ont été sélectionnées pour leur caractère emblématique, parce qu’elles permettaient de réfléchir à la façon dont la fiction travaille des enjeux anthropologiques. Mais, elles étaient bien peu nombreuses et ne sont pas à l’échelle de ce qu’a été l’engagement des professionnels de la télévision française dans la diffusion des œuvres littéraires et patrimoniales. C’est dans l’idée de contribuer à faire connaître leur travail que nous avons réalisé cet inventaire. L’objectif de ce travail, de la liste et des données que nous mettons à la disposition des lecteurs est donc de permettre d’avoir une vision synthétique de l’ensemble des œuvres de la culture classique mais aussi de conserver la possibilité d’analyser chacune dans sa singularité. Il pourrait être à terme étendu à l’ensemble de la production et de la diffusion de la fiction télévisuelle française.

Il y a également l’idée de mettre en partage non seulement les résultats d’une enquête mais aussi les sources mêmes d’un travail de recherche afin d’en faire une ressource pour d’autres chercheurs ou enseignants. Ce projet s’inscrit dans une logique d’ouverture des données.  Quel que soit le soin apporté à ce travail de recueil d’informations, il est possible que certaines œuvres nous aient néanmoins échappées. Nous remercions nos lecteurs de nous les signaler (sabine point chalvon arobase ehess point fr). La souplesse qu’offre le dispositif des annexes en ligne, nous permettra alors de les ajouter.

Ressources